Travailler ou ne pas travailler ?

20180207_Bercy_Neige_15_PhotoGézelinGrée.jpg

Le ministère des Finances, ©Bercyphoto

Au ministère des Finances et dans les administrations qui en dépendent, les cadres de la fonction publique semblent avoir plus subi les événements de Mai 1968 que d'y avoir pris part.

Le quotidien des témoins a été largement bousculé durant cette période. Outre les difficultés pour se déplacer, qui rendent leur chemin vers le bureau parfois pittoresque, ils rencontrent de sérieuses difficultés pour réaliser leur tâches. Certains prennent avec une certaine philosophie la situation tandis que d'autres regorgent d'énergie pour faire face à la difficulté.

Venir coûte que coûte

" On s'entassait dans la voiture et on partait de Vincennes, au milieu des embouteillages, grimpant sur les trottoirs, avec la voiture, pour arriver à la direction du Budget. "

Robert Lescure est, durant Mai 68, chef de bureau à la direction du Budget au ministère des Finances. Il relate comment il s'est rendu coûte que coûte au bureau grâce au co-voiturage organisé par son chef de service.

"Nous étions peu nombreux sur l'autoroute, et jamais on a circulé si lentement !"

Pierre Chancel, inspecteur général de l'agriculture, est, en 1968, secrétaire général du Fond d'Orientation et de Régulation des Marchés Agricoles (FORMA). Il témoigne des difficultés de déplacements quand on habite en banlieue et que l'essence vient à manquer.

" Je pouvais rien faire ! "

Laurent Guibert est, en Mai 68, chef de bureau à la direction des Assurances au ministère des Finances. Outre les difficultés pour se déplacer, il n'arrive pas à avancer sur les dossiers importants, du fait des grèves.

Quand l'argent vient à manquer

" On allait dans les banques, secrètement, chercher de l'argent pour payer les salaires ! "

François Garnier, inspecteur des Finances, est Secrétaire général des Grands Magasins Au Printemps et Président-directeur général de "Au Printemps-Nation" et "Au Printemps-Parly-2". Il relate comment il a réussi à payer les salaires des employés malgré les grèves.

" Il m'est arrivé [...] d'aller chercher près d'un milliard d'anciens francs [...] escorté de seulement un motard."

Gilbert Rey, Trésorier payeur général, était en charge des Hauts-de-Seine durant Mai 68, il a du faire face au manque de liquidités monétaires. Malgré les conditions peu orthodoxes, il s'assure de l'approvisionnement en francs.

" Je me rappelerais toujours la joie qu'il éprouvait le jour où il a pu nous annoncer que son personnel, enfin, s'était mis en grève, lui aussi, et que les Caisses d'Epargne, comme tout le reste, seraient fermées ! "

Michel Rougé était en Mai 68 sous-directeur à la direction du Trésor au ministère des Finances. Il relate avec beaucoup de vivacité la situation de la sous-direction durant les événements et se rappelle les difficultés que rencontraient le président de la Caisse d'Epargne, seul établissement financier encore ouvert de Paris.

Comment s'occuper en attendant que l'ordre revienne ?

"Restez chez vous !"

Jacques Campet était en Mai 68, administrateur civil au ministère des Finances. Il raconte les difficultés pour se rendre au travail mais également l'inactivité une fois arrivé. A se demander s'il ne vallait mieux pas rester chez soi...

Guy Delorme, inspecteur général des Finances, était chef du service de la Législation à la direction des Impôts au ministère des Finances. Face au manque d'activité au bureau, il tente d'occuper les jeunes inspecteurs des Finances sous sa responsabilité en leur faisant préparer de gros dossiers. Cependant, face à une suggestion d'un de ses collègues "dont la tête tournait, les nerfs avaient lâchés", il abandonne l'idée.

Dans le tumulte de Mai 68, la Banque de France s'est organisée pour faire face. Entre la création d'une liste de personnes autorisées à pénétrer dans l'enceinte et le décrochage de bannières, deux témoins racontent leur Mai 68 à la Banque de France.

"C'était mon métier de me faire huer."

Pierre Strohl est, en Mai 68, détaché au Secrétariat général à la Banque de France qui se voit redécorer par les manifestants de banderoles qui ne répondaient pas tout à fait au goût de l'administration.

Travailler ou ne pas travailler ?